Par Bruce Langstroth, FICA, Michael Wang, AICA, et Valerio Valenti, FICA, membres de la Commission sur la gestion des risques et le capital requis de l’ICA
À la suite de la publication de l’article intitulé Considérations relatives à l’examen de la santé financière en 2020 compte tenu de la pandémie de COVID-19 le 12 mai 2020, les membres de la Commission sur la gestion des risques et le capital requis examinent dans cet article les considérations relatives à la sélection de scénarios défavorables, y compris leurs retombées potentielles et les mesures correctives prises par la direction, compte tenu de la pandémie de COVID-19.
Considérations relatives à la sélection de scénarios de continuité et de solvabilité
La sélection de scénarios défavorables dépend, dans une certaine mesure, de la date de l’analyse et de la mesure dans laquelle le scénario de base reflète les incidences de la pandémie. Le degré d’intégration des incidences de la pandémie devrait être pris en compte (des exemples des divers degrés sont examinés ci-dessous). L’actuaire devrait s’assurer que les hypothèses relatives à la pandémie sont appliquées de la même façon dans le scénario de base et dans les scénarios défavorables. Il devrait aussi s’assurer que les scénarios défavorables ne sont pas excessivement sévères, du fait de l’ajout d’hypothèses défavorables à un scénario de base sévère tenant compte de la pandémie. En même temps, l’actuaire doit veiller à ce que les scénarios défavorables ne soient pas indûment optimistes.
La sélection de scénarios peut être un peu plus simple si la pandémie n’est pas prise en compte dans le scénario de base. L’actuaire peut examiner un ou plusieurs scénarios qui tiennent compte explicitement de la pandémie de COVID-19, de la nouvelle expérience qui en découle, de ses retombées et des mesures prises par la direction. À titre d’exemple, l’actuaire pourrait examiner les variations d’un scénario de pandémie et y intégrer les répercussions économiques et des effets de mortalité et de morbidité de gravité diverse.
Si le scénario tient compte de l’expérience relative à la COVID-19 jusqu’à présent, l’actuaire devra prêter une attention particulière aux hypothèses du scénario. Il devrait s’assurer que la vraisemblance conjointe des hypothèses relatives à la pandémie et des hypothèses du scénario n’est pas excessivement sévère ou indûment optimiste. Par exemple, si les répercussions économiques au 31 mars 2020 ont été intégrées dans le scénario de base, un scénario défavorable pourrait inclure une légère reprise ou une légère aggravation, comparativement à un scénario économique plus sévère qui aurait pu avoir été sélectionné n’eût été la pandémie.
Il apparaît clairement que nous n’avons pas encore vu toutes les répercussions de la pandémie. Bien que l’on ait constaté partout dans le monde une augmentation de la mortalité dans certaines tranches d’âge et une forte volatilité des marchés, il y a de nombreux ricochets possibles dont on ne sait rien encore. Les projections relatives à la COVID-19 peuvent comprendre les éléments suivants :
- Une hausse des pertes de crédit en raison de l’arrêt de l’économie et des récessions qui en résultent.
- Des troubles de santé mentale donnant lieu à une augmentation des réclamations en invalidité.
- Des risques émergents dans la période de prévision post-COVID-19. Par exemple, l’actuaire pourrait utiliser un risque informatique plus élevé dans son analyse pour tenir compte du télétravail et de la croissance de l’échange de données par Internet.
- Une augmentation des réserves. L’incertitude entourant la COVID-19 pourrait accroître la variabilité des règlements des sinistres en assurances IARD (pensons à des actions collectives pour interruption des activités commerciales) et, par conséquent, accroître le risque de réserve dans les scénarios de continuité et de solvabilité. L’augmentation des réserves pourrait peser davantage sur la situation financière d’une entreprise durant la pandémie de COVID-19 qu’en temps normal.
Considérations relatives aux retombées et aux mesures correctives prises par la direction
Il est question ici des mesures que la direction peut prendre pour atténuer les répercussions de la pandémie de COVID-19. À titre d’exemple, au début de la pandémie, les assureurs ont rapidement retiré leurs produits d’assurance voyage et donné avis de leur intention de mettre fin à leurs produits d’assurance frais médicaux de voyage. Dans le cadre de l’analyse de l’examen de la santé financière (ESF), l’actuaire devrait tenir compte de ces occasions qu’a la direction de limiter l’exposition de l’entreprise aux pertes.
Dans le rapport d’ESF, il est crucial de fournir des informations claires et détaillées sur les incidences de la pandémie. L’actuaire devrait décrire clairement la mesure dans laquelle la pandémie a été prise en compte dans le scénario de base et dans les scénarios défavorables. Le cas échéant, toute reprise par rapport aux répercussions économiques observées en mars et en avril devrait être mentionnée. En outre, l’actuaire devrait décrire toutes les retombées et mesures prises par la direction relativement à la COVID‑19 qui ont été intégrées et dans quelle mesure, le cas échéant, elles ont eu une incidence sur la sélection des scénarios défavorables.
L’actuaire devrait aussi déterminer si les réactions de routine et les mesures correctives de la direction dans des circonstances normales ou antérieures continuent de s’appliquer et demeurent appropriées dans le contexte de la COVID-19. Par exemple, il peut être plus difficile de réunir des capitaux en raison des restrictions touchant les marchés financiers. La réassurance est une mesure d’assouplissement traditionnelle pour la direction et sa disponibilité peut être considérablement limitée dans le contexte de la COVID-19. L’actuaire devrait prêter dûment attention aux hypothèses et restrictions clés entourant ces réactions de routine et mesures correctives et les divulguer dans le rapport d’ESF et dans la présentation à la haute direction et au conseil d’administration.
La bonne compréhension et l’interprétation de l’analyse de l’ESF s’appuient sur une compréhension claire de la façon dont la pandémie de COVID-19 a été prise en compte.