À quelques semaines de la mise en œuvre de l’IFRS 17, le 1er janvier 2023, nous avons revu le dossier avec les FICA et les coprésidents de la Commission directrice sur la norme IFRS 17, Sati MacLean et Les Rehbeli.
Étant donné que seulement quelques semaines nous séparent de la mise en œuvre de la norme IFRS 17, subsiste‑t‑il des éléments en suspens que les sociétés doivent aborder avant le 1er janvier?
Sati : Nous avons récemment terminé le contrôle de l’état de préparation à la transition, qui a servi de répétition pour remplir les relevés réglementaires de la norme IFRS 17. Les sociétés ont cerné certains éléments qu’elles devront améliorer. La plupart des assureurs se concentreront probablement sur le peaufinage de ces éléments et sur les aspects techniques qui n’ont pas encore été abordés.
Les discussions avec les auditeurs sont également un sujet d’actualité. De nombreux assureurs collaborent avec leurs auditeurs pour cerner et régler les problèmes potentiels avant la mise en œuvre de la norme. Cela s’applique non seulement au choix des politiques, mais aussi à leur application.
Les : J’aurais soulevé les mêmes points pour l’assurance vie. Je sais que des sociétés poursuivent le peaufinage et que certains de leurs choix de politiques reposent sur des discussions avec des auditeurs.
D’autres conseils pourraient‑ils être nécessaires de la part de l’ICA?
Les : Quelques éléments mineurs sont encore en suspens. Par exemple, la Commission des rapports financiers des compagnies d’assurance-vie (CRFCAV) mettra à jour sa note éducative sur les unités de couverture au début de 2023, afin de l’harmoniser avec la décision finale du Comité d’interprétation de l’IFRS (IFRIC), qui aura une incidence sur les rentes immédiates. À titre d’autre exemple, un certain nombre de commissions de pratique passent en revue plusieurs notes éducatives antérieures à IFRS 17 à la lumière des changements nécessaires pour tenir compte de cette norme. Il faudra archiver certaines anciennes notes éducatives ou les modifier pour qu’elles soient pertinentes en vertu d’IFRS 17. Nous ne nous attendons pas à ce que cela ait une incidence sur ce qui a été produit pour IFRS 17 à ce stade‑ci.
Les sociétés sont‑elles à l’aise avec la détermination des taux d’actualisation en vertu de l’IFRS 17 ou des apprentissages et des ajustements sont‑ils encore possibles?
Les : Comme pour tout, le niveau d’aisance varie d’une société à l’autre. Il est certain que de nombreux assureurs vie ont beaucoup réfléchi à l’élaboration d’une méthode de taux d’actualisation qui optimisera la performance financière à l’avenir, ce qui réduira la volatilité à laquelle ils peuvent s’attendre dans leurs résultats nets. Toutefois, il peut y avoir des assureurs n’ont pas encore fait autant de travail qu’ils l’auraient souhaité.
Une fois la mise en œuvre terminée et que les assureurs commencent à se familiariser avec la volatilité de leurs résultats nets sur la base de l’IFRS 17, je suppose que certains assureurs pourraient porter leur attention sur l’affinement de leurs méthodologies du taux d’actualisation.
Prévoyez‑vous des changements ou des ajustements à l’IFRS 17 après sa mise en œuvre?
Les : Je suppose que vous faites référence aux ajustements aux politiques et procédures comptables et actuarielles des assureurs plutôt qu’aux changements à la norme IFRS 17 en tant que telle. Je ne serais pas surpris de voir des assureurs apporter d’autres améliorations à leurs méthodologies au cours de la prochaine année ou la suivante, par exemple à l’approche sur le taux d’actualisation mentionnée ci-dessus.
Sati : Oui, je suis d’accord; il y aura des améliorations. Nous n’avons encore vu aucuns résultats publiés au niveau sectoriel. À mon avis, nul ne sera surpris de constater un large éventail de pratiques lorsque nous commencerons à présenter des rapports en vertu de l’IFRS 17. Par exemple, le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) a déjà soulevé des préoccupations au sujet de la gamme de pratiques qu’il observait relativement aux taux sans risque utilisés dans les études d’impact quantitatives. Il reste à voir si cette préoccupation subsistera du point de vue de la réglementation. Il existe aussi d’autres domaines où la pratique peut être assez large, par exemple l’évaluation des ajustements au titre du risque et l’examen des éléments de perte, pour n’en nommer que quelques‑uns.
Y a‑t‑il eu des surprises lorsque les sociétés ont analysé leurs résultats comparatifs? Dans l’affirmative, ont‑elles entraîné des changements importants dans la façon dont les polices sont élaborées, tarifées et gérées?
Sati : Il est difficile à ce stade de commenter les surprises, car il y a peu de renseignements accessibles au public. D’une certaine façon, nous attendons le « grand dévoilement » pour voir comment les assureurs du secteur ont interprété et mis en œuvre la norme IFRS 17. Dans le cas des assureurs IARD, en raison de l’application de décisions stratégiques différentes, il sera plus difficile de comparer un assureur à un autre. Pour les réassureurs, le traitement des commissions selon l’IFRS 17 aura une incidence sur les données financières. Par exemple, le chiffre d’affaires (c.-à-d. les revenus) sera moins élevé en raison du traitement des commissions de réassurance, même si les dépenses seront aussi amputées du même montant.
Lorsque les assureurs comparent l’IFRS 4 et l’IFRS 17, ils doivent comprendre les changements de présentation par rapport aux répercussions des modifications apportées aux hypothèses en vertu d’IFRS 17 et/ou des décisions relatives aux méthodes comptables pour mieux déterminer comment l’IFRS 17 a modifié l’évaluation et les données financières. J’imagine que de telles comparaisons par rapport à l’IFRS 4 se poursuivront pendant un certain temps.
Du point de vue des affaires, étant donné qu’IFRS 17 ne modifie pas les facteurs économiques fondamentaux de la plupart des produits d’assurances IARD, je ne m’attends pas à des changements importants à la tarification et à la gestion des polices. Mais puisque la constatation du bénéfice changera probablement, des discussions stratégiques intéressantes pourraient porter sur les types de produits souscrits à l’avenir.
Les : Je ne dirais pas qu’il n’y a pas de surprises en assurance vie, mais un changement évident pour de nombreuses sociétés se situe dans leurs pratiques d’appariement de l’actif et du passif (GAP). En particulier, les sociétés qui détiennent un nombre significatif d’actions dans leur portefeuille peuvent commencer à s’en départir et les remplacer par des types d’actifs différents. De plus, les sociétés pourraient réviser leurs stratégies d’appariement actif-passif des polices pour tenir compte du nouveau cadre. Je m’attendrais aussi à des modifications à la tarification des nouveaux produits d’assurance vie. En dernier lieu, je suis d’accord avec Sati qu’il pourrait y avoir d’autres apprentissages suivant le « grand dévoilement ».
Il a fallu un certain temps avant que les règles sur le capital soient finalisées. À quoi ressemblent actuellement les ratios de capital et constatons‑nous davantage de variabilité que par le passé?
Sati : Au niveau sectoriel, le BSIF vise une incidence neutre sur le capital. À un niveau plus détaillé, je m’attends à une importante variabilité de la façon dont l’IFRS 17 influera sur le ratio du test du capital minimal (TCM) d’un assureur à l’autre. Par exemple, le BSIF a instauré une exigence de 10 % sur les frais pour risque d’assurance, une mesure qui profitera à certains assureurs tout en nuisant à d’autres assureurs individuels.
Les : Il en va de même pour l’assurance vie : certains assureurs ont des ratios de capital à la hausse et d’autres à la baisse, en grande partie en fonction de leur gamme de produits d’assurance, ainsi que du type d’actifs qui appuient leurs produits. Les sociétés qui misaient généralement sur une utilisation massive des actions et qui détiennent des garanties financières à long terme verront probablement une baisse de leurs ratios, et celles qui ont des produits plus simples ou des actifs à revenu fixe qui les soutiennent seront probablement au neutre ou enregistreront un léger gain. Mais je m’attendrais également à la volatilité accrue des résultats, ce qui peut entraîner une plus grande volatilité des ratios du test de suffisance du capital des sociétés d’assurance-vie (TSAV) à l’avenir.
Les utilisateurs des états financiers (c.-à-d. les non‑actuaires) sont‑ils à l’aise avec la forme des bénéfices à l’avenir? Les nouveaux concepts, comme la marge sur services contractuels (MSC), sont‑ils généralement compris et acceptés?
Les : Je dirais qu’à un niveau élevé, il est plus facile de comprendre comment émergeront les bénéfices. Mais quand on scrute les détails – les points plus précis du fonctionnement d’éléments comme la MSC et les éléments de pertes – cela devient rapidement un labyrinthe que bon nombre d’intervenants auront probablement de la difficulté à naviguer. Toutefois, j’aimerais aussi souligner que le processus d’éducation se poursuit. Par exemple, la plupart des conseils d’administration reçoivent actuellement de l’information sur la façon de lire ces énoncés à un haut niveau, et je crois que la situation à ce titre continuera de s’améliorer au cours de la prochaine année, au fur et à mesure que cette formation sera offerte.
Sati : Je suis d’accord. Je crois qu’au fur et à mesure que la formation sera offerte et que la connaissance d’IFRS 17 augmentera, un plus grand nombre d’actuaires et de non‑actuaires apprendront à mieux comprendre les bénéfices en vertu de cette norme. Par exemple, les appels avec les investisseurs ou les renseignements fournis aux marchés mentionneront IFRS 17 à compter de l’an prochain. Je crois que les actuaires auront un rôle important à jouer pour aider les utilisateurs à comprendre la signification de ces nouveaux concepts et leurs répercussions.
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