Par Michel St-Germain, FICA, Président de l’ICA
La communauté actuarielle regroupe des professionnels ayant des talents et des intérêts communs, et je suis absolument convaincu que nos discussions nous permettent de devenir de meilleurs actuaires. À l’heure actuelle, il faut toutefois repenser nos façons d’établir des liens.
J’ai connu une belle carrière à titre d’expert-conseil en régimes de retraite au sein d’une grande firme de consultation. Après quelques années d’apprentissage, mes patrons m’ont fait comprendre que je devais, afin de réaliser mon plein potentiel, étendre mon réseau et rayonner à l’extérieur de mon bureau à Montréal. Je recevais alors des invitations par courrier escargot (dans une enveloppe!) pour participer à des conférences et à des groupes de travail avec des collègues actuaires, de même que d’autres professionnels au Canada et aussi à l’échelle internationale. De la même façon, j’ai entrepris mes activités de bénévolat auprès de l’ICA et la SOA, et celles-ci m’ont permis d’échanger avec de nombreux actuaires.
J’ai ainsi pu profiter de nombreuses conférences tout au long de ma carrière. Les contenus m’ont appris beaucoup sur les théories actuarielles et les enjeux des clients, mais les relations établies lors de ces événements m’ont été grandement utiles. Elles ont été l’occasion d’apprécier les différentes façons qu’un actuaire peut analyser un problème et recommander des solutions. J’ai pu aussi voir les similitudes et les différences entre la pratique actuarielle partout dans le monde.
Or, l’époque de ces conférences est révolue et elle pourrait ne pas revenir. Il faut imaginer autre chose et trouver de nouvelles façons de nous brancher sur ce réseau d’une incroyable richesse. Bien que la pandémie ait subitement mis fin à nos activités en personne, je suis d’avis que la COVID-19 a simplement accéléré un phénomène déjà en développement compte tenu des progrès technologiques et des intérêts des nouvelles générations.
Plusieurs avantages, mais un sérieux bémol
Partout autour, les conférences sont maintenant offertes par l’entremise de nouvelles technologies. Le meilleur exemple, c’est certainement la campagne électorale américaine qui se fait sans les habituelles conventions de partis ni les discours partisans à des foules. Heureusement, il est prévu que des débats entre les deux candidats aient lieu : ce qui permettra aux électeurs de les voir en interaction de la bonne vieille façon.
Outre le fait d’être plus sécuritaires en pleine pandémie, ces nouvelles approches me semblent offrir de nombreux avantages :
- Fini les vols d’avion et les nuitées à l’hôtel : on gagne donc du temps et on fait des économies;
- L’organisation est simplifiée, ce qui permet aux organisateurs de mettre l’accent sur le contenu et la fréquence des événements;
- Le format est flexible : il est possible de participer en direct ou d’écouter l’enregistrement à notre convenance.
Il y a un bémol toutefois. Nous ne savons pas encore de quelle façon remplacer la valeur qu’apporte les interactions humaines lors de ces événements. Les discussions informelles dans les corridors durant les pauses café et les réceptions contribuent au développement professionnel. Les plus jeunes n’ont plus la chance de côtoyer et d’observer le comportement des plus chevronnés lorsque vient le temps, par exemple, de se lever pour poser une question devant une assemblée.
À la suite de la pandémie, l’ICA a dû réagir rapidement et les rencontres « en personne » prévues à l’agenda du Conseil d’administration et des directions ont été remplacées par des appels conférences et des séances Zoom. De même, le Congrès annuel, qui était prévu en juin, se tiendra cet automne de façon virtuelle.
Également, nous avons annulé les rencontres de sensibilisation auprès des décideurs politiques, des clubs actuariels et des employeurs d’actuaires. Ces rencontres nous permettent d’éclairer les politiques publiques relativement aux questions qui nous concernent et de mieux saisir les besoins de nos membres. Nous reprendrons ces rencontres cet automne, mais de façon virtuelle. Certes, nous gagnerons du temps, mais est-ce que nous en tirerons les mêmes bénéfices que si nous y étions en personne? Nous verrons avec le temps.
Réinvention du PPC à l’ère de la COVID-19
Vous êtes membre d’une profession reconnue pour son intégrité et son désir de protéger l’intérêt public, et vous avez toujours accès à du perfectionnement professionnel continu (PPC) vous permettant de mieux servir vos clients et vos employeurs. À cet égard, la Commission de l’éducation permanente et le personnel du siège social consacrent beaucoup d’efforts à la mise sur pied des prochains événements virtuels et vous verrez bientôt le résultat de leur travail. Vous constaterez des gains en matière d’efficacité et une plus grande souplesse, ainsi qu’une augmentation du nombre d’événements.
Il y a quelques mois, les assemblées virtuelles sur la COVID-19 nous ont permis d’observer comment des actuaires de divers domaines de pratique composaient avec les défis de la pandémie. Ces forums virtuels nous ont donné un avant-goût du mode virtuel.
act20, le Congrès annuel de l’ICA, qui était prévu en juin, sera offert en mode virtuel au cours des deux dernières semaines de novembre. Cette décision peut paraître très simple, mais la renégociation de contrats aussi importants provoque un effet domino sur les autres contrats des prochaines années. Le personnel du siège social a agi rapidement pour renégocier ces contrats et l’impact financier a été minimal.
Nous avons également dû repousser l’Atelier sur le professionnalisme et le Cours orienté vers la pratique, deux événements clés dans le processus de la qualification pour obtenir les titres d’AICA et de FICA. En conséquence, nous avons repensé et restructuré notre offre d’éducation et de perfectionnement au grand complet. Le déploiement est prévu cet automne.
Nous avons offert le premier Atelier virtuel sur le professionnalisme le 27 août à une centaine de participants, soit le double du nombre habituel de participants durant les événements en personne. L’événement a connu du succès grâce à la flexibilité et l’ingéniosité des animateurs et du personnel.
Quant au Cours orienté vers la pratique (COP), il aura lieu à la mi-septembre et des conférenciers d’honneur et nos membres talentueux offrirons le même contenu selon les volets et des séances plénières pour les candidats.
En matière de perfectionnement professionnel, le Colloque sur l’expertise devant les tribunaux est offert sous la forme d’une série de webémissions le dernier jeudi de chaque mois. Le Colloque pour l’actuaire désigné aura lieu du 21 septembre au 1er octobre.
Pour de nombreux actuaires qui n’ont pas accès aux mêmes occasions que ceux qui œuvrent au sein de grandes sociétés, la formation offerte par l’ICA est capitale. Nous évoluons dans un environnement compétitif et il faut s’assurer que notre offre soit pertinente. Il faut aussi réfléchir à savoir si des séances additionnelles en lien avec les domaines émergents et l’amélioration de nos compétences générales (soft skills) doivent être offertes. Cette réinvention forcée de notre offre de PPC est donc une belle occasion d’innover.
Je souhaite que nous parvenions à offrir aux nouveaux actuaires tous les avantages d’évoluer au sein de notre communauté actuarielle en leur offrant l’occasion d’établir des liens avec leurs pairs. J’en ai profité durant ma carrière. Il nous faut trouver des façons pour que les jeunes actuaires puissent, eux aussi, en bénéficier.
Parmi les leçons de cette expérience, nous devons retenir que nous avons la capacité de changer de cap rapidement et de renouvellement. Nous avons appris que la technologie s’avère fort précieuse pour nous rapprocher les uns des autres, mais qu’elle n’est pas infaillible. Nous avons appris que notre communauté de membres et notre personnel nous soutiennent, qu’ils sont créatifs et patients. Les récents événements virtuels offerts par l’ICA m’inspirent confiance. Je crois que nous parviendrons à améliorer notre offre et à prendre ce virage numérique avec succès.